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samedi, 08 février 2014

Le soir de « re-pas sage »...

Le soir du 24 décembre ma mère et mon père m’embrassèrent et me quittèrent en me promettant de m’amener dans l’après-midi du lendemain mon Noël.
Bon, reconnaissons-le, l’idée de passer le réveillon tout seul dans une piaule à deux lits dont seul le mien était occupé ne m’enchanta pas vraiment…
Quand mes parents furent partis, je me tournai vers la fenêtre avec les larmes aux yeux. Puis je me mis à pleurer en silence.
Ça eut des effets secondaires désastreux. C’est pour ça que je m’en souviens si bien…
Les « boules à thé » qui m’évitaient la tentation de regarder partout donc de bouger les yeux, étaient pleines de gaze destinées à empêcher la lumière de pénétrer.
La gaze, une fois imprégnée de larmes et probablement d’un produit antiseptique, se mit à me piquer les yeux, les deux, horriblement au point que je me mis à hurler et voulut arracher ces « boules à thé ».
L’infirmière se précipita. Celle du soir aussi était gentille, sûrement parce que j’étais le seul enfant dans le service.
Elle me rinça les yeux, changea la gaze, me consola en me câlinant.
Elle partit un moment et revint quelques minutes plus tard avec des chocolats qu’elle me donna « à la becquée » jusqu’à ce que je m’endorme.
Je dormis finalement plutôt bien.
Et me réveillai tôt. Eh ! C’était Noël !
Puis j’attendis. J’appris ce matin-là le mot « astreinte », Geneviève me l’a dit, « être d’astreinte à Noël, c’est emmerdant ! Mes enfants à moi seront comme toi, sans leur maman, pauvres petits que vous êtes ! »
Je connaissais tous les mots, sauf « astreinte ». Elle me l’expliqua en me perçant la fesse de l'aiguille aussi monstrueuse que biquotidienne car « les microbes n’ont pas de vacances de Noël, ils sont d’astreinte tout le temps… »
Je la reverrai vers midi, quand elle m’apporterait mon assiette de purée avec jambon haché, assiette qu’elle me donnerait à la petite cuiller.
C’était finalement sympa de redevenir bébé, si j’avais pu regarder autour de moi, tout aurait été parfait. J'aurais glandé jusqu'à la retraite.
A vous raconter ça, lectrices chéries, je le revis avec une acuité dont je ne pensais pas être capable. La mémoire est quand même un outil fantastique…
Geneviève repartit s’occuper des autres, les « vieux », pendant que j’attendais avec impatience, non mes parents, que j’avais l’habitude de voir peu, mais mon Noël.
Mon père ne rentrerait du travail que vers sept heures et mes parents arriveraient avant sept heures et demie car Bichat était à trois stations de bus de la maison.
L’après-midi s’étirait interminablement. Plongé dans le noir il ne m’était pas possible de me balader dans les couloirs. En plus je n'avais pas le droit. J’étais coincé dans ce lit jusqu’à je ne sais quand !
La voix de ma mère dans le couloir me souleva de joie. Ma mère a toujours eu une voix qui porte. Un peu comme Lara Fabian, vous voyez ? D’ailleurs c’était la seule capable de crier plus fort…
Mes parents entrèrent dans la chambre et m’embrassèrent.
Mon père, avec l’humour de m… dont il était coutumier me dit « Finalement, un œil par an, c’est pas mal. Au moins on sait où tu es et tu te tiens tranquille… Oui, dommage que tu n’aies que deux yeux… Bon, c’est embêtant pour le lycée mais faut ce qu’il faut, hein fils ?  »
Ma mère, à l’humour pas trop développé cria « Lemmy ! T’as pas honte ? Mon fils, n’écoute pas ton père ! Il dit ça mais il t’aime ! »
J’eus à peine le temps de dire « je sais maman… » qu’elle cria à mon père « Dis-lui que tu l’aimes, Lemmy, dis-lui ! »
J’osai alors « qu’est-ce que j’ai eu à Noël ? »
Ma mère me posa alors sur le ventre un carton assez grand mais pas très épais en disant, théâtrale comme toujours, « Tiens, mon fils ! Tiens, mon sang ! » en m’enlaçant sauvagement ce qui ne me renseigna pas et me pressa les « boules à thé » à me les incruster dans la figure.
Mon père, plus calme –et plus pragmatique pour une fois- me dit « c’est le train électrique que tu as vu dans la vitrine boulevard de Strasbourg… »
J’avais hâte qu’ils s’en aillent maintenant, histoire de mener à bien l’idiotie qui avait germé à l’instant même dans mon esprit…

vendredi, 07 février 2014

Le lancement du voyage spécial de votre cosmonaute...

Le mari volage fut sollicité brutalement par sa moitié sur un ton qui lui rappela une incartade à faire oublier d’urgence.
Ce mari, monsieur M. du nom d’un âne resté célèbre pour sa nombreuse descendance, avait certes une voiture, une Dyna Panhard.
Cette voiture, de mémoire de Goût et autres habitants du coin,, nul ne l’avait jamais vu rouler.
Il passait tous ses dimanches allongé sous elle, ses outils éparpillés autour de lui.
Faute d’une auto vraiment mobile, il me prit dans ses bras et m’emmena d’abord à la pharmacie Renault du coin de la rue et du boulevard Ornano.
Le pharmacien a dû regretter longtemps de s’être laissé circonvenir par le gamin sur l’œil duquel il posa une gaze.
Il se jura sûrement de ne plus jamais vendre des produits bizarres à des gamins sur la foi de leur air angélique…
Toujours dans les bras du mari et sanguinolent , je fus emmené à la station de taxis de la place Championnet. Le premier, à nous voir arriver, démarra à vide et partit.
Le second refusa en gueulant « Ça va pas ?! Et mes sièges, hein ! Qui c’est-y qui va payer le nettoyage, hein ? Qui c’est-y ?! »
Je me rappelle ce type comme si c’était hier.
Le troisième n’était pas un taxi mais nous emmena à l’hôpital Bichat en me plaignant.
Je fus admis tout de suite et, jusqu’au lendemain, je ne sais rien de ce qui s’est passé.
Je fus réveillé par une infirmière qui s’appelait non pas « madame » mais « Geneviève ». Et quel réveil ! Une piqûre monstrueuse se planta dans mon fessier alors tendre.
J’ai sursauté, Geneviève m’a dit « Tu t’es déjà crevé un œil, tu ne veux pas que je te crève une fesse, hein, mon garçon ? ».
Ma mère arriva avec mon père ce dimanche.
Non Mab, non Brigitte, on ne me donna pas de raclée…
Ils ne dirent rien. Je ne les voyais ni l’un ni l’autre.
J’étais aveugle ! J’eus de nouveau la peur de ma vie jusqu’à ce qu’en me passant les main sur la figure je constate que je portais des trucs épouvantables.
Pire, mes parents m’apprirent que je devrais rester là et porter ces trucs-là jusqu’à ce que l’œil blessé soit guéri.
Lectrices chéries, voyez-vous les « boules à thé » ? Ces deux demi-sphères de toile métallique cerclées d’une armature ?
Imaginez les, deux ou trois fois plus grandes et liées solidement entre elles comme une paire de lunettes puis attachées derrière votre tête  comme le masque de Zorro.
C’est la référence qui me vient, à pas encore onze ans on ne pense pas encore aux yeux composés des Muscæ Calliphoridæ mais à Zorro.
Bref, j’étais condamné au cirage vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour je ne savais combien de temps…
Heureusement, dans quelques jours, ce serait Noël.
Quelques jours s’écoulèrent ainsi dans le noir, troublés seulement par les deux piqûres quotidiennes de pénicilline qui allaient à coup sûr donner un relief lunaire à un fessier qui n’avait jusqu’à présent connu que les fessées et la pommade Mytosil.
Mes sœurs n’avaient pas le droit de venir, l’hôpital leur était interdit. La plus grande passait parfois le soir mais ne restait pas longtemps.
Ma mère passerait les après-midis, me passerait la main sur la joue et m’embrasserait en soupirant…
Je perdais le compte des journées qui étaient interminables. Dans le noir vingt-quatre-heures sur vingt-quatre, sauf les cinq minutes du moment où le professeur B. passait, me regardait l’œil avec un ophtalmoscope qui m’éblouissait. Il m’engueulait, râlait, disant « mais arrête de bouger les yeux, ne bouge pas les yeux ! Tu vas te déclencher une hémorragie, et là… »
Je me rappelle ces engueulades comme si c’était hier.
Bon, je peux bien vous le dire, il est mort maintenant et s’appelait « Blancard », « Professeur Blancard ». Il portait des lunettes à monture d’écaille et était très gentil avec moi.
Noël lui donna raison…

jeudi, 06 février 2014

On te fera la peau, névrose !

Un peu assourdi mais apparemment en forme, j’allais me désoler d’avoir gaspillé du si beau matériel quand j’entendis des cris dans la cour.
La voisine en face était à la fenêtre et hurlait « Un attentat ! C’est un attentat ! Ah ces salauds de bicots ! Etrangers ! »
La voisine en face, Espagnole, ne se laissait pas déranger par le fait qu’elle-même était une étrangère, pas plus que par des bêtises du genre « politiquement correct ».
J’avais néanmoins eu un peu peur.
Gêné par quelque chose comme des larmes, je me suis passé la main sur le visage.
C’est quand j’ai regardé ma main pleine de sang que j’ai eu les genoux qui se mirent à trembler. Je suis allé à la cuisine, suis monté sur la chaise pour être à la hauteur du miroir dont mon père se servait pour se raser et ma mère pour se maquiller les grands jours.
J’ai eu la peur de ma vie en contemplant mon visage ensanglanté, mes joues constellées de petites blessures et mon œil droit qui saignait.
Je me suis mis à pleurer puis, constatant que je n’étais ni mort ni aveugle –l’élevage à la schlague des Frères avait au moins un côté positif qui faisait se soucier des choses vraiment graves- je sortis sur le palier, frappai chez la voisine, madame S.
Personne ne répondit. Je savais qu’à l’étage au dessous, tout le monde travaillait et les quelques enfants qui étaient là savaient qu’il leur était interdit d’ouvrir à qui que ce soit.
Je descendis donc encore un étage.
Je frappai à la porte de madame C., la femme du bougnat du rez-de-chaussée.
- Qui c’est qu’c’est ? Demanda-t-elle de sa voix de mêlé-cass mâtinée faubourien.
- C’est Patrice, du quatrième… Dis-je d’une voix mal assurée.
- Qu’est-ce que t-as mon bonhomme ? Dit-elle en ouvrant la porte.
Dès que la porte fut ouverte, madame C. me regarda, poussa un soupir et s’effondra d’un coup.
Je la crus morte et me mis à crier, la voisine d’en dessous ouvrit sa porte et se précipita.
Elle me prit dans ses bras et m’emmena au rez-de-chaussée et entra dans le bistrot du bougnat en disant « Emmenez le gamin à l’hosto ! Et toi, va ramasser ta bonne-femme ! »
Je sais que la voisine du premier ne portait pas madame C. dans son cœur depuis qu’elle l’avait sortie de son lit où elle était fort occupée avec son mari.
Madame C. s’était comme ça retrouvée en costume d’Eve dans la rue, en demeure de fournir une explication à son bougnat de mari tandis que la furie du premier réclamait les mêmes à son mari qui s'était finalement révélé fort occupé pendant une période de chômage.
Le bougnat et le chômeur s’entendaient plutôt bien, l’un dépensant libéralement les sous de sa femme chez l’autre.
Attention lectrices chéries, si vous saviez tout ce que les enfants peuvent voir, entendre et se rappeler, vous seriez épouvantées…
Le bougnat avait appelé l’hôpital Bretonneau, hôpital pour enfant mais il n’avait pas de service d’ophtalmologie et avait dit « emmenez le à Bichat ! ».
Et il fallut m’emmener à l’hôpital Bichat.
Ce qui ne se passa pas sans mal…

mercredi, 05 février 2014

Chroniques martiennes.

Don’t worry, Coumarine, on peut faire mieux.
Que je te raconte.
Je vais tenter de te consoler car je sais que, contrairement à une idée répandue, le malheur des autres permet de supporter les siens.
On se sent moins seul.
Surtout l’œil qui reste…
C’était un samedi, je me le rappelle bien.
D’ailleurs je ne suis pas près d’oublier ce mois de décembre 1959…
Quelques jours avant Noël, peu de jours avant mon onzième anniversaire.
La veille, en fin d’après-midi, chez un copain qui habitait près de chez moi mais dans un appartement nettement mieux boulevard Ornano, nous avions peaufiné les derniers détails techniques d’un essai qui allait révéler au monde qu’il n’y a pas que les Russes et les Américains pour tenter l’aventure intergalactique.
Nous avions surtout parlé d’un essai précédent qui avait dépassé nos espérances.
A l’abri des regards indiscrets, dans un terrain vague aujourd’hui occupé par un immeuble immonde, nous avions procédé à un lancement de missile couronné de succès.
L’engin, constitué d’un tube de cigare « emprunté » au père de mon copain, bourré d’un mélange de limaille d’aluminium, de soufre, de perchlorate de potasse et de sucre, s’était élevé jusqu’à la hauteur du deuxième étage de l’immeuble voisin.
Un brillant succès vous dis-je.
Je voyais déjà mes parents m’accompagner au cap Canaveral, pas encore cap Kennedy puisque ce dernier n’avait pas encore eu la chance d’être assassiné pour donner son nom à un accident géologique.
Vous savez comme on n’est pas malin, surtout pas prudent, à ces âges. J’imaginais bien qu’en réduisant le diamètre de sortie et en accélérant la combustion du mélange, j’allais augmenter la poussée de l’engin.
Un petit bouquin acheté aux Puces de Saint Ouen toutes proches, « Le manuel de l’artificier » m’avait renseigné sur des détails qu’on ne sait normalement pas à cet âge. Un peu comme pour les filles, vous voyez ?
Hélas, la méconnaissance des effets de la combustion, et surtout de ses résidus allait me jouer un mauvais tour.
Mauvais tour qui allait transformer un petit garçon au regard de biche et à l’œil perçant en petit garçon au regard divergent et à l’œil percé…
Tout avait pourtant, j’en étais sûr, été préparé dans les règles de l’art.
La fenêtre donnant sur la cour était ouverte. L’altitude du site de lancement –le quatrième étage- me rapprochait à coup sûr de la Lune.
La rampe de lancement, constituée d’une règle au profil en croix, posée et fixée à la colle blanche sur un plumier de bois piqué à ma grande sœur, orientée vers une trouée entre les immeubles qui ouvrait la voie du ciel, le tout posé sur le coffre contre la fenêtre.
Bref, tout était parfait. Sauf le détail où se cache le diable.
J’allais à la cuisine, bus un verre d’eau, montai sur une chaise pour attraper la boîte d’allumettes mise, pensaient mes parents, hors de ma portée.
Je revins, poussai un soupir d’aise, jetai un dernier regard au vaisseau qui allait rejoindre la prochaine étoile, Proxima Centauri, sans aucun problème.
Le « boum » monstrueux ne tarda pas qui me laissa étourdi…
A demain.

mardi, 04 février 2014

Ah Dieu ! Que la guerre est jolie !

Berthoise signe un commentaire qui m’ouvre des horizons insoupçonnés sur les motivations profondes des femmes en matière de partage de lit.
Non, non, lectrices chéries, il ne s’agit pas d’une étude exhaustive de notre comportement animal dès qu’on est –au moins- deux dans un lit.
Quoique…
Mais non, il s’agit tout bêtement de la propension des femmes, dès qu’elles entrent dans un lit déjà occupé par une moitié mâle, à coller sur les cuisses d’icelui des pieds gelés ou contre le ventre du même des fesses aussi froides que leurs pieds.
Il me vient à l’esprit que peut-être les garçons ont probablement dans un recoin du cerveau limbique un souvenir diffus du confort de l’endroit d’où ils viennent au point qu’ils consacrent quand même l’essentiel des ressources de leur jugeote à concocter des stratagèmes qui leur permettront de retourner y faire un tour.
Les femmes, quant à elles,  ne feraient alors que profiter  des heureuses dispositions masculines à leur endroit pour se venger sauvagement des souffrances par elles endurées pour donner naissance à un congénère.
Dans tous les cas, les garçons sont fichus et condamnés à perdre moralement le combat.
Ou l’enfant a, au passage endolori la mère, ou le père du précédent a été la cause de ladite douleur.
Bref, l’homme est perdant dans cette histoire, il est celui qui a toujours tort.
Vous pouvez faire confiance à votre Goût chéri, il le vit depuis longtemps…

Dons, de douleurs en représailles se perpétue sous la couette cette guerre qui met aux prises des fesses, des cuisses, des pieds et des ventres.
Les uns froids, les autres chauds.
Chacun essayant de mettre au chaud ce qui lui tient sur l’instant le plus à cœur.
Mais non, lectrices chéries, n’allez surtout pas lire ce que je n’ai pas écrit.
Je sais que je me défends en matière d’ambiguïté mais tout de même…