samedi, 24 août 2013
L’employé de bourreau…
Ça fait déjà plusieurs jours que je cherche quelque chose à dire sur mon blog.
Quelque chose qui puisse vous intéresser, lectrices chéries.
J’ai cherché un sujet.
Vainement.
A croire que je ne connais que des rois…
Alors je me rabats sur des choses qui, si elles ne sont pas sans importance, sont sans intérêt. Oui, il y a, comme ça, des choses capitales sans intérêt. (Ouais, bon, je sais…)
Il me revient que Lakevio remarquait il y a peu que nous marchions beaucoup dans notre enfance des années 50 et 60.
Et c’est vrai.
Il y avait intérêt si on voulait avoir quelques pièces dans les poches.
Surtout si on sortait d’une famille où l’idée d’argent de poche était bannie pour cause de fin de mois trop proche du début de mois…
Mes sœurs allaient à l’école pas loin de la maison, donc à pied.
J’allais au lycée dans le IXème, j’avais droit à un carnet de tickets par semaine.
Si je devais rendre visite le jeudi à la salle d’étude, j’étais bon pour y aller à pied.
Grâce à un long entraînement à la marche, j’avais droit à un argent de poche secret : le prix d’un carnet de tickets.
Las, ma mère s’aperçut un jour qu’une carte de métro hebdomadaire était moins chère.
Mon « argent de poche » fut amputé illico de la différence…
Et ça c’était absolument dramatique.
D’abord ce fut une débâcle financière car avec un carnet de tickets je faisais plusieurs semaines, voire plusieurs mois en gardant les sous des tickets. Je n’utilisais ces tickets que parcimonieusement, lorsque le froid était trop vif ou la pluie trop drue. Le remplacement des tickets par la carte hebdomadaire présenta en outre un inconvénient majeur, celui de me contraindre à claquer de temps en temps deux semaines de « sous de carte » pour acheter un carnet de tickets.
Tous ces stratagèmes me poussèrent parfois à profiter d’un moment d’inattention pour récupérer dans le porte-monnaie maternel le « manque à gagner » dû à ces fichues cartes.
Je dois avouer que la surveillance du budget était telle que ces incursions me rapportèrent dix fois plus de taloches et de punitions que de sous.
Ma mère connaissait le contenu de son porte-monnaie au centime près. Pour avoir entendu des cris et vu des larmes en pagaille, je sais que mes sœurs se livraient aussi à ce sport délicat et risqué.
Ma mère devait se sentir assiégée par une armée de gosses acharnés à lui retirer ce qui semblait être ce qu’elle avait de plus précieux : ses sous !
Ma mère resta aux « anciens francs » jusqu’à l’apparition de l’€uro.
Hélas, avec l’apparition de l’€uro, elle se contenta de passer des « anciens francs » aux « nouveaux francs »
Dans la dernière année de sa vie, elle sema à tout vent, remerciant l’ambulancier et le chauffeur en donnant à chacun un billet de cinquante €uro en leur disant « tenez, voilà cinquante francs, merci beaucoup. »
Et ces salauds les ont pris.
Ils n’ont certainement pas compris qu’il n’y avait que nous qui avions eu le droit de voler ma mère.
C’était, il est vrai, il y a longtemps et ce ne fut jamais facile.
Notre mère avait cet œil d’aigle qui lui faisait voir le moindre éclat douteux dans nos doigts. Elle avait aussi cette ouïe de chat qui lui faisait détecter le moindre tintement dans nos poches.
Hélas, elle avait aussi ce sens si particulier qui faisait que, rien qu’au poids des pièces dans sa main ou à celui de sont porte-monnaie, elle savait quelle somme s’y trouvait.
Mon dieu que nos larcins étaient peu aisés à commettre !
Ça a été comme ça jusqu’à ma quatrième…
Ce n'est pas qu'après nous avions appris à voler, c'est que sous la pression paternelle et des rentrées d'argent plus conséquentes, elle dut se résoudre à nous donner quelques sous chaque semaine.
Nous n'avions plus qu'à lui apprendre que l'inflation ne frappait pas que son cabas mais aussi nos poches.
Ce ne fut pas une mince affaire...
10:09 | Commentaires (8)
mercredi, 21 août 2013
Des hauts et des bas nylon...
Ma mère avait certes un goût de ch…, ce que j’avais constaté à mes dépens avec cette histoire de veste au lamé turquoise, mais aussi une ouïe de chat, un nez de chien et un œil d’aigle.
Ce qui lui permettait de détecter la moindre bêtise commise par sa progéniture.
Cette ouïe de chat avec valu à ma sœur cadette, dite « Souricette », une taloche d’importance.
Un jeudi que ma mère avait décidé de ramasser le souk que nous avions mis dans la chambre et s’y était attelée à grand renfort de récriminations voire de cris, dans « la grande pièce » où nous étions assis côte à côte sur le divan, ma sœur m’avait chuchoté à l’oreille « Tiens ! Voilà la mère S. qui se déchaîne ».
Et que vîmes-nous dans l’instant ? Une tempête arriver de la chambre, coller une taloche à « Souricette » en criant « Je vais te montrer, moi, si je me déchaîne ! ».
Elle appuya sa remarque d’une claque sur les fesses de la coupable.
Ce n’est pas de cela que je voulais vous parler, lectrices chéries, mais de cette affaire de bas.
Cette histoire de bas tua dans l’œuf la première tentative d’évolution de ma grande sœur dans le monde des adultes et élimina dans l’instant le fruit de mois d’économies entièrement réalisées à l’huile de genou de frère et sœur. Il lui fallu des mois pour réitérer l'expérience. Elle avait fait des progrès en dissimulation. Et nous aussi.
Grande sœur avait eu quinze ans cette année là, elle « causait » de temps à autre avec un garçon du nom de G.
Il n’était question de rien. Sauf qu’un jour elle escroqua de mon père l’autorisation d’aller voir « Sissi Impératrice » qui était en exclusivité pile poil pendant les grandes vacances.
Nous on irait voir rien…
« Souricette » et moi avons assisté aux préparatifs de grande sœur.
Avec une check-list de pilote de ligne.
Coiffure des cheveux châtain clair : OK
Ballerines cirées : OK
Socquettes blanches : OK
Kilt impeccable : OK
Corsage blanc impeccablement repassé : OK
Petit gilet bleu marine sans fil tiré ni bouton manquant : OK
Petit sac à main : OK
Ne restait qu’à attendre l’heure de partir. Avec tromperie sur le temps de voyage à pied, cette fois-ci elle prendrait le métro.
« Souricette » et moi admirions grande sœur si belle pendant qu’elle attendait un moment où ma mère irait dans la cuisine.
Le moment arriva. Grande sœur nous fit signe que « chuuuttt… », se précipita sur son cartable, en tira un emballage mince qu’elle plia et mit rapidement dans son sac à main.
Elle dit « au revoir !!! » d’un ton super guilleret et partit.
Elle aurait dû revenir à l’heure où ma mère faisait les commissions mais les séparations prennent souvent plus de temps qu’escompté vers ces âges là…
Ce quart d’heure de retard fut funeste.
Elle rentra à la maison, alla rapidement dans « la grande pièce » et hélas y trouva ma mère.
Le nez de chien frappa d’abord. « Tu t’es mis de mon cadeau ! » dit ma mère, allusion à l’eau de toilette reçue à Noël et qui finirait éventée des années plus tard.
Puis ce fut l’œil d’aigle qui vit se concrétiser les pires craintes de ma mère et de grande sœur.
« Mais… Mais… Mais tu as des bas !!! » cria ma mère et son réflexe premier fut de coller une tarte à grande sœur.
« Du parfum et des bas ! Tu tournes mal ma fille ! » hurla-telle de plus belle, n’oubliant pas d’ajouter « Tu vas finir comme ces filles de la Porte de Clignancourt ! Des filles à soldats ! Attends que je le dise à ton père ! ».
Mon père ne la tua pas. Il tenta seulement de calmer ma mère.
Ce qui lui retomba sur le nez…
13:51 | Commentaires (11)
dimanche, 18 août 2013
Queue de poisson…
La note que Mab émit il y a quelques jours a ravivé de vieilles courbatures chez moi.
Non, lectrices chéries, je n’ai pas du tout la courbature écologique mais sans aucun doute durable…
J’ai cru, à la lire et trompé par la photo, qu’elle et Maky, accompagnés de leur petite troupe de gamins chamailleurs s’étaient rendus à l’Aquarium du Trocadéro.
Il m’est alors revenu quelques promenades, enfin, je dis « promenades », il s’agissait plutôt de l’épreuve de marche qui clôt l’entraînement de l’admission à la Légion Etrangère…
Les dimanches d’été, ma grande sœur nous traînait souvent, ma sœur cadette et moi, à l’aquarium du Trocadéro. C’était pour elle une méthode financement bien pensée…
Il était question, depuis la fin de la deuxième Guerre Mondiale, de grands travaux à lancer incessamment –un peu comme les grilles de notre résidence, vous voyez ?- pour améliorer cet aquarium.
En attendant ces travaux, le prix à payer pour voir les poissons était très modique.
Suffisamment modique en tout cas pour que même notre mère veuille bien sortir ses sous.
Ma grande sœur connaissait ma mère et lui monta un bateau dramatique, plein de dangers et de petit frère et petite sœur épuisés. Elle plaida ce que je pensais être notre cause avec insistance, si bien que notre mère –oui, « ma mère », celle pour laquelle vous me servez de psy- lâcha le prix d’un carnet de métro demi-tarif en sus du prix des entrées de l’aquarium.
Ce que je pensais être notre cause se révéla être la cause de ma grande sœur…
En fait, ma grande sœur avait grugé ma mère, sur le prix des entrées d’une part et sur l’usure de nos jambes d’autre part.
Nous sommes donc allés d’un bon pas jusqu’à la Place Clichy, puis sommes descendus jusqu’à la gare Saint-Lazare, puis la Madeleine, jusqu’à la Seine et les quais jusqu’à Trocadéro.
Il faut avouer que les quais nous parurent longs. Ma grande sœur elle-même commençait à être fatiguée mais elle nous entraînait malgré tout. Tenant chacun de nous par la main, un d’un côté, l’autre de l’autre.
Une double épée de Damoclès suspendue à un crin qui lui semblait de plus en plus fin au dessus de la tête.
Elle savait que s’il arrivait quelque chose au fils unique, chéri et préféré de sa mère, tout comme à « Souricette », prunelle des yeux de la même mère, elle risquait gros.
Heureusement, elle savait nous entraîner à coups de « On est bientôt arrivé », de « Si on s’arrête pour s’asseoir sur un banc, on ne pourra plus repartir. »
Et on suivait. Il faut avouer que, d’un tempérament vénal, nous savions être achetés rentablement. Elle avait grugé ma mère, on se tapait près de sept kilomètres à pieds, mais on aurait notre part du butin laborieusement sorti du nid de scorpions de ma mère.
C’était un chantage muet mais qui fonctionnait bien. On parcourut rapidement l’aquarium, ma petite sœur n’avait pas payé l’entrée, il lui avait suffi de faire au gardien la moue qui marchait si bien.
Ma grande sœur nous mena après notre visite éclair sous la Tour Eiffel.
Elle acheta des bonbons pour nous tous, que nous dégustâmes avec plaisir sur un banc du Champ de Mars.
Ne rêvez pas, lectrices chéries, elle nous grugea aussi car elle en acheta pour beaucoup moins que le prix du billet manquant et d’un carnet de métro.
Mais nous avions récupéré suffisamment d’énergie, décuplée par la joie d’avoir escroqué notre mère, pour marcher d’un bon pas jusqu’à la maison, près de la Porte de Clignancourt.
Elle nous arnaqua suffisamment souvent j’en suis sûr, pour détourner de quoi acheter une paire de bas en douce. Ce qu’elle en fit ? Mystère.
Mais cette affaire de bas reste dans les mémoires de la fratrie.
Je vous raconterai ça une prochaine fois. Je crois que ma grande sœur en a encore chaud à la joue droite…
19:19 | Commentaires (13)
vendredi, 16 août 2013
Ascenseur pour les fachos…
Ce matin, je lisais la note de Clodoweg qui relatait ses menus plaisirs de clopeur satisfait par la cigarette électronique.
Evidemment, son plaisir était atténué par le fait que rien ne vaut la vraie « goldo », la « qui râpe » mais compensé par le plaisir de voir que chaque bouffée de son petit chauffe-eau ne rapportait pas un cent à l’état.
Il remarquait aussi que là où travaille Sylvère, la « cage fumeur » était une espèce d’aquarium dans lequel il était interdit d’installer un confort aussi rustique qu’une table et une chaise. La chaise seule était même interdite.
Pourrir la vie du fumeur lui semblait être le but principal de ces interdictions stupides.
La remarque m’a fait penser à notre inénarrable « accidentologue », celui qui nous a expliqué pendant des années que l’idée même de fumer allait nous trouer les éponges à coups de pinces de crabe.
Cet intégrisme fascisant, cet entrain à nous protéger de tout, surtout de nous mettre à l'abri du plaisir m'exaspère. Aaaahhh... Plaisir coupable, forcément coupable.
Ce couillon dangereux qui veut nous ramener à l’époque bénie où les trains anglais devaient être précédés sur les voies par un piéton agitant une cloche afin de nous prévenir tout danger d’être écrasé par ledit train.
Cet aimable cinglé pour qui toute idée autre que passer sa vie en état d’hibernation était pleine de dangers qu’il fallait absolument éviter.
Tout ça, bien sûr, grâce à une obéissance obséquieuse aux conseils de « ceux qui savent. »
En y regardant de plus près, je constate que ce qui tracasse le plus nos fondus de la santé, ce n’est pas que nous soyons de santé précaire, du moment que nous mourons tôt, brutalement et sans soins dispendieux qui réduiraient à néant les économies dues à notre trépas.
Ne les intéresse pas du tout le fait que nous soyons en bonne santé, que ce soit grâce ou non à leurs conseils qui sont plutôt des oukases.
Non, ce qui les tracasse, c’est que nous puissions prendre plaisir à l’une ou l’autre de nos occupations.
Vous ne mangez plus, vous vous nourrissez. Et il est bien vu que vous vous rappeliez à chaque tranche de saucisson qu’elle concourt activement à vous boucher les artères.
Vous ne vous baignez plus, vous exercez une activité physique. Et il est bien vu que vous songiez à tous ces petits muscles qui vont vous permettre de ne pas agrandir le trou de la Sécu car ils ne seront plus entrelardés à coup de ces vicieux lipides qui vous font grossir, pardon « vous mettent en situation de surpoids ».
Le verre de vin que vous prenez à table ? Ne le goûtez pas avec délectation.
Il ne doit être que frustrant, dès que l’envie vous prend d’en déguster un second, songez qu’il ne sert qu’à limiter le risque d’accident cardiovasculaire.
Ce truc qui vous guette si vous vous contentez de vous promener ou de vous baigner avec plaisir au lieu de « prendre de l’exercice qui est si bon pour la santé ».
Quant au câlin, ne rêvez pas, il n’est pas question d’amour. Si vous vous y livrez, laissez tomber cette histoire de délices, songez plutôt à la production d’endorphines et d'ocytocine, mesdames, qui vous mettent dans de si heureuses dispositions. Vous messieurs, pensez seulement que ça va retarder l’inévitable « hypertrophie bénigne de la prostate ».
Dans tous les cas, messieurs, on va vous seriner « faudra surveiller ça pour éviter le cancer de la prostate »
Un de ces mandarins, sans doute sortant de la messe où on lui avait rappelé que « le péché de chair » -traduisez « faire un câlin sans faire d'enfant »- vous envoyait illico en enfer, avait affirmé y a quelques années, avec un sens du ridicule consommé « une femme avec une vie sexuelle normale n'échappera au cancer du sein que pour risquer le cancer de l'utérus. »
En fait, je me demande si notre bande de fondus de la santé ne cherche pas uniquement à supprimer la notion de plaisir de notre existence déjà pas drôle tous les jours.
Leur véritable ennemi semble être ce qu'ils considèrent comme une maladie et est connue sous le nom de « joie de vivre »...
Ont-ils pensé seulement qu’on peut mourir d’ennui ?
On peut donc assimiler leurs conseils à des tentatives de meurtre et qu’ils risquent une inculpation sous le chef de « mise en danger de la vie d’autrui » ?
Qui a parlé de syllogisme ?
09:42 | Commentaires (13)
mercredi, 14 août 2013
Pride and prejudice...
Nous sommes allés au Monop’ de la Nation.
Oui, lectrices chéries, nous faisons aussi nos courses chez Monop’.
Ce n’est pas parce qu’Heure-Bleue est une « bourgeoise rouge » et que je suis « bobo » plutôt « bolchevik bohème » qu’on va tout laisser aux bourgeois ! Les vrais, les grands, les ceusses qui vivent de la sueur de l’ouvrier.
Même si l’ouvrier est trader…
Donc, sur le chemin du Monop’, notre promenade vespérale du soir, comme dirait Bérurier – Non, non, lectrices chéries, je ne lis pas que Flaubert, Balzac et Théophile Gautier- nous sommes, Heure-Bleue et moi, passés devant un immeuble que je dirais « normal » mais qu’Heure-Bleue a aussitôt déclaré « pourrave » car elle sait causer « zarma » couramment sous le coup de l’émotion.
A côté de la porte de l’immeuble, deux plaques.
Un gynécologue-obstétricien.
Un pneumologue.
Et Heure-Bleue de m’asseoir d’un « Tu vois, rien qu’à cause de l’immeuble, je n’irais voir aucun des deux ! »
- Mais tu es pleine de préjugés ! Me suis-je exclamé du haut des miens qui sont différents.
Elle a insisté d’un sérieux « on est marqué par l’environnement où on a passé son enfance ! »
J’ai abondé dans son sens, d’ailleurs j’ai intérêt, Heure-Bleue aime bien le débat mais apprécie peu la contradiction…
- Moi, jusqu’à dix-huit ans, j’ai vécu dans le XVIIème, dans le bon XVIIème ! A-t-elle ajouté.
- Ben moi, jusqu’à dix-huit ans, j’ai vécu dans un coin « pourrave » du XVIIIème…
Du coup, elle n’est pas à l’aise dans certains coins à la fois populaires et populeux.
Elle est finalement assez bégueule.
Alors que je suis aussi bégueule qu’elle mais avec le culot dont m’a doté la nature, je suis à l’aise partout…
Nous nous sommes sentis très bien dans les fauteuils du Danieli.
Elle ne se sent pas très bien rue de la Goutte d’Or…
09:08 | Commentaires (13)